Jonathan Lamarche - Photographies

Vous êtes nombreux, après avoir visité ma ma galerie dédiée, à me demander comment faire pour réaliser des photographies d'orages. Il existe plusieurs techniques photographiques. Le principal est de bien se placer par rapport à l'orage, et surtout de limiter les risques. Pour s'attaquer à la chasse aux orages, et surtout pour ramener de belles images, il est indispensable de maitriser les bases de la photographie et même un peu plus. La patience et la persévérance sont les meilleurs alliés du chasseur d'orages.


La sécurité


La chasse aux orages n'est pas une activité anodine. La sécurité, votre sécurité, est fondamentale et doit être la priorité de tous les instants. Rien ne sert de produire de belles images si l'on ne peut en profiter par la suite. Plusieurs risques peuvent dès à présent être identifiés, même si ce n'est clairement pas une liste exhaustive.


Le foudroiement


Le risque qui parait le plus évident est le foudroiement. Et pourtant c'est sans doute statistiquement le moins présent de ceux que je vais évoquer. Chaque année, une centaine de personnes sont foudroyées en France. Un coup de foudre peut s’abattre à plus de 20 kilomètres du cœur de l'orage, sans aucun signe précurseur.


Il convient de se tenir le plus éloigné possible à la fois de l'orage et des éléments les plus hauts dans sa proximité immédiate De même, évitez de vous retrouver comme étant le point le plus élevé du paysage environnant. Si telle situation venait malencontreusement à vous arriver, éloignez vous de tout élément métallique (y compris ceinture, téléphone portable, ...), accroupissez-vous, et poser vos mains sur la tête, la main droite au dessus de la main gauche.


La voiture joue le rôle de cage de Faraday, et isole la plupart du temps d'un foudroiement. Toutefois, on recense quelques rares cas de foudroiement à l'intérieur de la voiture qui en font un abri qui reste imparfait.


Si vous ressentez des fourmillements, ou que vos cheveux viennent à se dresser sur votre tête, réfugiez-vous en urgence dans votre véhicule en laissant votre matériel en plan. Vous êtes situés sur l'un des points d'impact potentiels du prochain coup de foudre, dans quelques secondes !


Un coup de foudre proche, très proche, ou directement sur quelqu'un, pourra entrainer des conséquences graves et irrémédiables en terme de santé, voire la mort. Donc prudence !


La montée des eaux


Le risque de crue n'est pas négligeable en cas d'orage, en particulier d'orages en V. Restez vigilants, ne vous engagez pas sur une route inondée, même s'il n'y a que quelques centimètres d'eau. Cela peut suffire à noyer le moteur, ou même à emporter le véhicule. De plus, une montée extrêmement rapide des eaux n'est jamais à exclure, et la voiture se trouve alors être un piège redoutable. Evitez de stationner sur les points bas et les ponts : un lâcher ou une rupture de barrage en amont sont des aléas possibles, créant une vague annihilant tout sur son passage.


La grêle


La grêle peut se révéler très violente, même en France. Des grêlons d'une taille supérieure à 10 centimètres de diamètre peuvent voir le jour sous un orage, et détruire tout ou presque sur leurs passage, en particulier les voitures. Des rideaux de grêle (plus blancs et plus bruyants que les rideaux de précipitations) peuvent se repérer au loin avec de l'expérience. Dans tous les cas, évitez de vous trouver dessous. Si vous vous retrouvez pris au piège, abritez vous.


Le vent


Le vent en lui-même peut déstabiliser la voiture, ou encore faire tomber des branches, déraciner des arbres, ou plus simplement porter de petits objets qui, une fois lancés dans les airs à plus de 100km/h, sont de véritables petits missiles. Pensez à vous protéger du vent et à ne pas rester sous un élément qui pourrait être emporté dans votre direction (paneau publicitaire, échafaudage, arbre, ...). En bord de mer, les embruns et le sable sont les ennemis déclarés du matériel photographique.


Au delà de ces coups de vents, les tornades et autres trombes peuvent causer beaucoup de dégâts. Restez vigilents, ne vous risquez pas sur leurs trajectoires qui sont la plupart du temps très changeantes et aléatoires.


La route


Un risque que l'on sous-estime souvent est le risque routier. Tout d'abord, je ne peux que vous enjoindre à respecter le code de la route en toute circonstance, notamment les limitations de vitesse par temps de pluie.


La pluie, justement, rend la route glissante, spécialement les premières gouttes. Un véhicule en parfait état, en particulier les pneumatiques, sera un atout non négligeable pour votre sécurité. On peut signaler un produit qui fait des miracles pour la visibilité à travers le pare-brise sous la pluie : Rain-X. Ce produit ne dispense évidemment pas d'une vigilance et d'une vitesse adaptée.


Lorsque vous stationnez, pensez systématiquement à la manière dont vous devrez repartir. Remonter un chemin boueux n'est pas une sinécure dès que la pluie a fait son effet. Rester coincé et embourbé est grand classique du chasseur d'orage. De plus, reculer dans le noir n'est pas évident. N'hésitez pas à vous garer en marche arrière pour faciliter votre départ, surtout s'il doit être précipité.


La grêle rend la chaussée extrêmement glissante en quelques instants. Là encore, prudence.


Enfin, la fatigue est clairement un risque mal identifié. Ne prenez pas la route si vous êtes fatigué. Une bonne sieste sur le chemin du retour est souvent le choix de la raison.


Dans tous les cas, si vous êtes témoin d'un événement grave (incendie, tornade, accident de la circulation, ...), n'oubliez pas de porter assistance aux personnes en danger comme le prévoit la loi et de prévenir les secours.


La météorologie


Des connaissances en météo sont un atout de poids pour le chasseur d'orage. Pouvoir identifier à l'avance les zones susceptibles d'être prises pour cibles par les monstres kérauniques permet de mieux anticiper. Une fois sur le terrain, bien connaitre les cycles de naissance, vie et mort des orages permet de mieux les saisir, de mieux s'orienter, et d'être plus en sécurité.


Les nuages


Les cumulonimbus sont les nuages d'orages. Ils peuvent culminer, sous les latitudes françaises, à 10-12km au dessus du niveau de la mer. Les différents mouvements de l'air créent une charge électrique à l'intérieur du nuage. La différence de potentiel avec le sol, qui en résulte, va entrainer les éclairs, qui ont pour rôle de tenter de rétablir naturellement l'équilibre électrique entre sol et air. C'est pourquoi l'on parle de décharge électrique.


Les éclairs


Il existe différents types d'éclairs : le coup de foudre, la décharge extra-nuageuse, les éclairs inter-nuageux, les éclairs extra-nuageux, les éclairs rampants. Les coups de foudre peuvent être des deux polarités : négatifs le plus fréquemment, ou positifs. Qu'ils soient positifs ou négatifs, les coups de foudre sont soit descendants (allant du nuage vers le sol, les plus fréquents), soit ascendants (allant du sol vers le nuage).


Lors d'une décharge orageuse, le canal principal est plus lumineux que les ramifications. En tentant de rejoindre le sol, l'électricité contenue dans le nuage essaye plusieurs chemins à la fois. Le premier de ces cheminements à atteindre le sol déclenche l'arc en retour, qui est le moment le plus intense, et donc le plus lumineux. Les autres canaux ne sont pas retenus comme chemin privilégié entre le nuage et le sol.


La foudre peut avoir une tension de plusieurs dizaines de millions de Volts, une intensité de plusieurs dizaines de milliers d'Ampères, et l'air à proximité immédiate peut s'élever à une température de plusieurs dizaines de milliers de degrés Celsius.


Le tonnerre


Le tonnerre est la résultante de cet air chauffé à blanc, qui se dilate violemment et provoque une onde sonore qui va se propager de manière circulaire autour du canal.


Le son ayant une célérité proche de 300m/s dans l'air aux conditions ambiantes, il est possible d'évaluer la distance du point d'impact d'un coup de foudre. Il suffit de compter le temps qui s'écoule entre le coup de foudre et le tonnerre. Vous divisez alors par 3 ce temps (en secondes) pour obtenir la distance à laquelle l'impact a eu lieu (en kilomètres). Si par exemple il s'est écoulé 6 secondes entre le moment où j'ai vu le coup de foudre et celui où j'ai entendu le tonnerre, l'impact a eu lieu à environ 6/3 = 2km.


Généralités


Même s'il existe des exceptions, les orages en France ont tendance à se déplacer en suivant un flux : ils viennent du Sud-Ouest pour aller vers le Nord-Est. Se placer au Sud de se flux est souvent mon choix, car il évite de se retrouver sous la pluie, et permet de mieux visualiser les coups de foudre.


La météorologie n'est pas une science exacte, il est toujours bon de le rappeler. Des orages peuvent se déclencher alors que les modèles, et donc les prévisionnistes qui sont tributaires de ces outils, ne laissaient rien présager. Et inversement. Une chasse à l'orage ne permet pas à tout les coups de voir des éclairs, et encore moins d'en photographier.


Déroulement d'une chasse à l'orage


Une chasse réussie est souvent une chasse bien préparée en amont.


Les préparatifs


Tout d'abord, plusieurs matériels peuvent s'avérer nécessaires, utiles ou pratiques. Partez avec : le plein de carburant, de l'eau et des en-cas, une carte routière (indiquant les dénivelés, les points de vue, les cours d'eau, etc) pour planifier les déplacements, un système GPS, votre téléphone portable et son chargeur allume-cigare, une veste imperméable et chaude, une lampe torche (j'ai une préférence pour les lampes frontales de marque Fenix), vos papiers, plusieurs sacs plastiques, de l'argent liquide, et bien sûr votre équipement photographique. Essayez d'avoir tout ça à portée de main, si ce n'est pour partie en permanence dans la voiture. Perdre du temps à chercher sa lampe chez soi est exaspérant lorsque l'orage approche.


Le matériel photographique


Quelle que soit la marque pour laquelle votre cœur penche, privilégiez les reflex numériques. Si votre choix se porte vers un compact ou un bridge, assurez vous que ce dernier possède un mode manuel et une prise filaire pour télécommande.


Vous pouvez avoir besoin de tout type de focale, de l'Ultra-Grand-Angle pour les ambiances jusqu'au téléobjectif pour les détails d'éclairs. Cela dépend principalement de votre rapport à l'orage et du type d'image que vous pourchassez. Il n'y a pas d'objectif à proscrire.


Plusieurs cartes mémoires sont vivement conseillées. Préférez plusieurs cartes de petites taille qu'une unique de grande taille. Quatre fois 4Go sont préférables à une fois 16Go. Si l'une de vos cartes venait à rendre l'âme avant d'avoir vu son contenu déchargé...


Un trépied est indispensable. Préférez un trépied lourd et/ou bien lesté. Une rafale de vent couche très facilement un appareil photo, pouvant lui causer bien des dégâts.


La chasse


Une fois bien équipé, vous prenez la route direction les orages ! Bien connaitre les lieux permet de gagner du temps, et souvent de soigner ses compositions aux petits oignons.
Comme déjà évoqué précédemment, la prudence est de mise. Partir à plusieurs


Vous pouvez utiliser la radio de votre véhicule, sur les grandes ondes, pour écouter les orages. Vous entendrez des craquements, plus ou moins longs et forts selon la distance et la puissance de l'orage.


Un contrôle d'identité n'est pas à exclure. Restez calmes, expliquez ce que vous faites sur les lieux, obéissez aux forces de l'ordre, et vous pourrez reprendre votre route quelques minutes après. Ce genre de pratique est monnaie courante avec des individus s'affairant lampe frontale vissée sur le crâne, coffre de voiture ouvert, proches d'habitations. Et c'est plutôt de nature rassurante.


La prise de vue


Etre au bon endroit et au bon moment est le seul secret d'un cliché d'orage réussi.


Photographiez toujours en raw. Non seulement vous pourrez réajuster la balance des blancs en post-traitement, mais vous aurez également plus de facilités pour récupérer une zone trop ou trop peu exposée, ce qui est monnaie courante dans cet exercice.


Si vous venez à vous retrouver sous la pluie, votre matériel photographique peut être exposé. Certains boitiers sont tropicalisés, il en est de même pour certains objectifs. Veillez à ce que votre couple boitier-objectif soit tropicalisé avant de l'exposer à la pluie. Pour ma part, je n'ai pas de boitier tropicalisé. Je recours donc à un sac plastique que je troue à son extrémité, et que je fixe sur le pare-soleil de l'objectif avec trois trombones. Ainsi, le matériel est à l'abri. La lentille frontale ne doit pas être exposée aux gouttes d'eau, sous peine de venir ternir le rendu de l'image finale. Le pare-soleil est souvent la meilleure des protections, lorsque le vent ne vient pas de face.


Essayez d'inclure des éléments au sol dans vos photos, afin de donner une échelle aux éclairs photographiés.


La foudre n'est pas le seul élément qui peut être esthétique. La nature recèle de nombreuses surprises qui attireront votre regard, comme les structures nuageuses gigantesques.


Les dernières décharges sous un orage sont souvent les plus puissantes. Ajustez vos réglages en conséquence.


Capturer des éclairs de nuit


Les photographies d'éclairs sont beaucoup plus simple à réaliser, techniquement, de nuit.
Les explications que je vais donner ne sont en rien une recette universelle. Le chasseur d'orage doit s'adapter et ajuster ses réglages en fonction de son environnement. J'explicite ici des réglages simples qui permettent d'orienter le choix du photographe. Ils ne sont pas à prendre au pied de la lettre : gardez en mémoire que ces recommandations sont des ordres de grandeur, et que selon les circonstances vos besoins peuvent varier et dépasser ces valeurs.


L'utilisation d'un trépied est indispensable. Il permet de stabiliser la prise de vue. L'idée générale pour réaliser des clichés de nuit est d'adapter vos réglages à l'environnement ambiant, sans tenir compte des coups de foudre, puis d'utiliser le mode rafale jusqu'à ce qu'un éclair fasse son apparition dans le champ.


Suivant la distance de l'orage, régler votre diaphragme sur une valeur allant de f/4 (orage éloigné) à f/10 (orage proche et/ou puissant). Réglez ensuite votre sensibilité assez basse (200 ISO ou 400 ISO), puis ajustez votre temps de pose pour avoir un paysage correctement exposé, hors orage. Vous obtiendrez quelque chose du genre "f/5.6 - 200 ISO - 30s". Utilisez ensuite le mode rafale, en attendant qu'un éclair fasse son apparition. Une demi-heure de pose représentera ainsi 60 clichés, la durée de vie de l'obturateur n'est pas mise en jeu à cette échelle.


Après le premier coup de foudre, visualisez le résultat sur l'écran arrière, et exploitez la courbe de niveau. Si le coup de foudre n'est pas exposé correctement, modifiez les réglages. S'il est sur-exposé, fermez plus le diaphragme (ou réduisez la sensibilité), et pour compenser allongez le temps de pose pour maintenir un environnement bien exposé. Inversement, si le coup de foudre est sous-exposé, augmentez l'ouverture du diaphragme (ou la sensibilité) et réduisez le temps de pose. Vous ne pouvez pas jouer sur le temps de pose pour ajuster l'exposition de l'éclair, car celui-ci ne dure (et donc ne marque le capteur) que quelques dixièmes de secondes. Le trinôme "ouverture - sensibilité - temps de pose" permet d'exposer correctement le paysage, tandis que le trinôme "ouverture - sensibilité - durée de l'éclair" permet d'exposer correctement l'éclair. On comprend alors mieux pourquoi le bon réglage se fait en affinant ouverture et sensibilité, puis en ajustant ensuite le temps de pose en fonction des deux premiers.


Déclencher lorsque l'on aperçoit un éclair est une technique peu fiable, nécessitant de bons réflexes, et donnant le plus souvent un résultat au mieux médiocre. Ce n'est pas la méthode à privilégier.



Capturer des éclairs de jour


Il existe plusieurs méthodes pour capturer des éclairs de jour. Une seule me donne satisfaction, la première que je vais développer.


Première méthode, celle que j'utilise, recourir à un matériel spécifique. J'utilise un détecteur photosensible qui se branche sur l'appareil via la prise télécommande, et qui ordonne le déclenchement à la moindre variation de lumière. Vous pouvez trouver les plans de ce détecteur ici ou bien le commander déjà réalisé . Ce détecteur fait suite à un projet mené sur le site Chasseurs d'Orages.
Cette fois-ci, on règle l'appareil pour correctement exposer le paysage, et essayer d'avoir un temps de pose proche au minimum de la seconde. Puis, il suffit d'attendre qu'un éclair pointe le bout de son nez. La cellule, correctement réglée, permet d'obtenir un déclenchement à la moindre variation de la luminosité et ainsi capturer les éclairs. Les résultats sont très bons.


Seconde méthode, dérivée de ce que l'on vient de voir pour la nuit : le mode rafale. Il convient alors d'allonger au maximum le temps de pose, en réduisant la sensibilité et en fermant le diaphragme. Il est possible d'adjoindre un filtre gris neutre, mais veillez à ne pas dépasser les filtres faisant perdre 3EV. Au delà, les éclairs se perdent de plus en plus. Les inconvénients de cette méthode sont nombreux. J'en vois au moins trois. La durée de vie de l'obturateur est cette fois en jeu : on se retrouve vite à faire 1000 clichés sans capturer le moindre éclair. Ensuite, le rendu n'est pas très bon, du fait du diaphragme trop fermé qui engendre entres autres des phénomènes de diffraction. Enfin, les ramifications de l'éclair ont tendance à ne pas apparaitre sur le cliché final.


Troisième méthode, déclencher lorsque l'éclair pointe le bout de son nez. Cette technique, que j'évoque précédemment pour les photos de nuit, est très aléatoire en fonction des réflexes du photographe et du temps de déclenchement du boitier.



Pour plus d'images, n'hésitez pas à visiter et revisiter mon Portfolio consacré aux orages ou le site Chasseurs d'Orages.